STONES : In a long, long-on train...
Il aimait beaucoup les Stones, et il ne leur prédisait pas une très longue vie. Mais finalement, depuis cinquante ans qu'il est mort, seul Charlie Watts l'a rejoint. Et Charlie était le plus tranquille de tous.
Nos TER : c'est pas beau, ça, la France des chemins de fer ? La France de Chatelguyon, par exemple, celle du Point G ? ...SVP ? Celle du Bordeaux-Agen ? Qui c'est qui a dit que cette France profonde, c'est l'Amérique ? Serge ?
Vivent les TER, PdmC, me chantais-tu alors ? Ils sont cacochymes comme notre SNCF, comme notre CGT, comme notre pays. Ce TER béni passait - à la vitesse d'un solex - de par les monts du Lyonnais, Loire, 42, Roanne, pour venir mourir au bout de la fertile plaine de la Limagne. Il était temps de se retrouver, nous deux, après le départ si rapide, si soudain, de tes parents....
...Vivent le Train Bleu et les autres belles gares où les voyages commencent sur les plafonds.A
BIG LE SPLEEN - Sergio
SERGE, C'ETAIT MON AMERIQUE A MOI. ET DONC : SPLEEN.
Pour lui comme pour bien d'autres, dont nous parlons parfois. Exemple : comme elle a cheminé, DAN… Depuis 15 ans… Il y a plein d’histoires qu’elle aura pas sues, plein de gens dont elle aura pas connus ni même entendu parler, plein d’actions auxquelles elle aura pas participé, et dont elle n’aura même jamais su qu’elles allaient exister… Ceux qui restent demandent : « - Que faire de quelqu’un comme ça ? » Rien, car elle, elle ne fait presque plus partie de notre vie, désormais. Elle s’en va peu à peu, Dan, en arrière, toujours aussi souriante. Elle nous fait des signes, mais c'est comme pour ma belle-mère, on ne la voit plus très bien... On ne s'en souvient plus trop, ou trop bien ; on se laisse oublier, sauf que ceux là, ils ont tout faux... Elle repart vers Serge. Elle est drôle, croit-on, Danielle, on va la faire remonter à la surface, on se dit. Mais non. Ça se passe comme pour un homme à la mer semé par le bateau qu’elle ne rattrapera plus, qui s'enfuit, inexorable, involontaire.
AUTRE TROP CHER DISPARU : SERGE B, qu'on voit sur cette photo, chez Noëlle Isnard, infirmière-limonadière aux Mès ; et fière de ses pénitents, gloire du 04. Mais on ne le voit que de dos, parce que depuis plus de quarante trois ans qu'il est mort, je n'arrive pas à parler de lui, à personne, comme si chaque fois que je parlais de lui, je l'usais un peu, je le diminuais, je le rendais moins SACRÉ.
- Mais Jean, c’est nous qui nous éloignons ! C’est nous qui avançons et qui avons comme raison ou tort, on ne sait pas, on avance. On a horreur du vide, il faut qu’on soit, il faut qu’on hurle, qu'on existe, qu’on bouge, qu’on se dresse à nouveau. On est la vie, bordel. Et la vie a toujours raison, Clara.
À la fin, les souvenirs se transforment en mots, nous dit Jean d'O. Et c'est finement observé.
Il détestait les corridas, Serge. Beau sujet de discussion, à quarante ans de là ?
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Les AMOURS ENFANTINES des autres sont souvent indifférentes. Elles ne regardent qu'elles.
Mais celles de mon ami XXG et de mon amie XYD vieillissent à part. Après ce coucher de soleil orange-à-mort, ils ont eu de nombreuses et romantiques parties de jambes en l'air, boostées par la passion juvénile qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre. Mais (et c'était bien prévisible) la passion s'était envolée de leurs coeurs, et le romantisme idiot occidental a vite fait place au réalisme. Classique séparation.
Puis la vie a repris ses droits. Jobs. Mariages. Enfants ! Nouvelles de temps à autres, bavardages, gossips, potins. Et en plus, j'y contribuais : car au fond, je suis au courant de tout... Les notes, les rencontres, les photos... Autres enfants, bref, tout allait bien.
- Puis XYD, elle est morte, en quelques minutes, d'un infarctus merdique en Bretagne, une coupe de champagne à la main.
Et depuis, parfois, lorsqu'il est repris par la nostalgie, certains soirs, l'ami XXG m'appelle. Il essaie désespérement de me faire raconter la suite d'histoires qu'il n'a pas connues, car il s'en fichait alors bien pas mal. Et puis il y a ses filles à elle, qui ne verront jamais cette photo, qui ne connaîtront jamais cette histoire, son histoire. Dont elles se fichent peut-être. Mais qui n'a pas été rien.
- Et moi, j'essaie désespérément de me souvenir, de décrire, de lui raconter, de lui préciser (combien a-t-elle eu d'enfants ? Ses filles ? Que vivaient-elles, où vivaient-elles, quelles études ? Ont elles des enfants ? Et son fils ?), d'expliquer. Mais il y a bien des choses, je peux pas lui dire, c'est confidentiel sa vie à elle, son mari, tout ça. Alors, pour mon potos, mes infos, c'est comme le doliprane. Ça fait du bien une heure ou deux.
ENDOUME EN SEPTEMBRE Fastueuse rencontre de teintes pastels à Marseille, réhaussés par une typique : la cagole qui semble interpeller son cakou dans la rue. Ne manquent que le bruit, et les odeurs, mais à peine. Photo shootée en trois secondes, et qui méritait bien plus de travail, de réflexion, de temps, mais nous allions à un mariage, alors... Dommage, la pollution a dû réduire à néant ces dits pastels.
Rubrique suivante, Paris. C'est pas pareil.
CITATIONS - APHORISMES - ÉCLATS DE MÉMOIRE
15/10/2008 : « …de préférence tout nus, permettant de comparer les attributs des uns et des autres et de voir que la nature nous a fait semblables mais pas tout à fait pareils, que les hommes et les femmes sont différents mais complémentaires… »
St Germain en Laye. J'ignore pourquoi j'ai pris cette photo qui ne rappellera rien à personne, et en particulier à moi.
Où va-t-elle, cette belle américaine ? Qui se promène là-dedans, aurait dit mon père ?
Une belle AMÉRICAINE n'a rien à voir avec le grand siècle, même pas dans Melville...
Mais celle-là, par ce dimanche après-midi sonore et désert, je la trouve pas mal du tout.
VIEILLES LAUZES et abbayes du XIIe siècle. Pourquoi chercher des LEÇONS ailleurs ?
Presque aussi anciennes que l'abbaye sistercienne, les toits des villages de Corse : j'aurais beaucoup aimé ces vols de pigeons qui tournoyaient au dessus de nos antiques toitures de lauze, comme par delà les nuages. Ils nous mataient : pendant ce temps, avec Sappho, nous faisons des photos de la cuisine à la salle de bains, de la CUISINE à la bibliothèque, nus 24H/24. Nous nous mations, reluquions, nous nous espinchions.
Lozère, fin des années 80
J'avais du mal à m'habituer à ces pays. Surtout en hiver, en décembre ou en janvier, quand la bruine locale tombe indéfiniement sur les tombes de pierre volcanique et noire des cimetières parpaillots. C'est un peu trop dur pour moi, Clara, tant de tristesse usée, de granit luisant, de pluie, de froid, de nostalgie.
- Pourtant, je viens d'un département pas si drôle, très peu peuplé.
Là, c'est à CAPRI
Et là, cest à BLAMONT, arrière-cour d'un hôtel pouilleux dans le haut Doubs. Quand les cadres se donnent bonne conscience en économisant sur les frais de déplacement. Quel dommage qu'il n'ait pas poursuivi l'aventure automobile avec moi, Serge... Bon, même si Citroën c'est pas Porsche, j'en avais vu, des choses à partager...
Comment disait-il, Richard B. ?
...Ah, oui : "C'est beau, une ville, la nuit". C'est beau, quand on boit des camparis et des martinis au 29e étage. En regardant de haut le siège tout bleu de sa bonne vieille société. Surtout quand on redescend sur terre pour manger des huîtres gilardeau. A toute heure la nuit, Paris ou sa si proche banlieue offrent de discrets abris aux amoureux illicites et pressés. Il leur suffit d'un rien, une chambre, un grand lit, et plus personne dans le hall.
Cie Fabre, Chargeurs Réunis, Clara ! C'est sur ce CARGO mixte que j'ai fait mon légendaire voyage de pilotin, ou élève officier de la marine marchande. Cap sur les Antilles : Martinique, Guadeloupe. Il y avait des filles sous ces latitudes. Elles se rasaient le sexe comme elles pouvaient.
Cuba, Haiti & C° vus de loin, avant les USA, Port Arthur, Texas. Je n'avais que 17 ans, mais j'ai vite compris que si les marins ont une femme dans chaque port, les doudous ont un marin sur chaque bateau ; et qu'il ya beaucoup plus de bateaux que de ports, Clara. Mont Aigoual à quoi dans quel port ?
- Je ne me souviens même plus.
Le Mont Aigoual, cargo mixte, suite
C'est embarqué sur ce navire que je mis - depuis les escales de Fort de France et de Pointe-à-Pitre - le cap sur PORT ARTHUR, port voisin de Houston, Texas USA. Je ne risquais que de rencontrer Janis Joplin, qui était née dans cet enfer de moustiques et de blancheur dix petits ans avant moi, en 43. Mais qui l'avait sans doute oublié (car l'enfer s'oublie) et qui roulait grande musique et train d'enfer. Je ne savais même pas qu'elle chantait, à cette époque. Je m'occupais d'autre chose. J'avais pas le niveau. Janis est morte d'une banale et classique overdose (foudroyante et coûteuse erreur du dealer : il a dû se faire engueuler, il lui avait vendu de l'héroine pure, et non pas de la dope à 10 %) le 4 octobre 1970, soit deux mois après mon passage dans ce port pourri, qu'elle n'aura certainement pas revu dans l'intervalle.
- J'ai toujours hai la drogue et ses dealers de merde.
Finis, les monts de Vénus tant aimés des marins : Nom d'un mont, le Mont Aigoual :
MON PUTAIN de GOLFE du MEXIQUE
Golfe du Mexique, Mont Aigoual, mois d'août 1970 - la suite :
tu vois ces étranges taches orange, sur le pont vert ? C'est du minium. Le pilotin, fringant élève officier de la marine marchande, descend chaque après-midi de sa passerelle d'officier pont pour redevenir simple mortel, autrement dit matelot (et même "nono", ou novice) ce qui correspondait mieux à son niveau d'expérience. Hiérachie ? Tu passes des griffes du second capitaine à celles, pas manucurées du tout, du "bosco", le contremaître, corse sur c.e voyage. DRH sans tendresse. Son job ? Poncer le putain de pont du plus grand cargo du port de Marseille, et virer les taches de rouille.
Je me livrai à cette tâche ménagère (rappel Audiard : (qui) "ne sont pas sans noblesse") dix-sept jours durant. Ça lui faisait les pieds, au petit-fils de l'armateur d'en face ?
C'est embarqué sur ce navire que je mis - depuis les escales de Fort de France et de Pointe-à-Pitre - le cap sur PORT ARTHUR, port voisin de Houston, Texas US. Je ne risquais que de rencontrer Janis Joplin, qui était née dans cet enfer de moustiques et de blancheur dix petits ans avant moi, en 43. Mais qui l'avait sans doute oublié (car l'enfer s'oublie) et qui roulait grande musique et train d'enfer. Je ne savais même pas qu'elle chantait, à cette époque. Je m'occupais d'autre chose. J'avais pas le niveau. Janis est morte d'une banale et classique overdose (foudroyante et coûteuse erreur du dealer : il a dû se faire engueuler, il lui avait vendu de l'héroine pure, et non pas de la dope à 10 %) le 4 octobre 1970, soit deux mois après mon passage dans ce port pourri, qu'elle n'aura certainement pas revu dans l'intervalle. - J'ai toujours hai la drogue et ses dealers de merde.
- Salut l'amie.
Bon voyage. Oui.
Même si je n'ai jamais trop aimé tes textes, ta musique, tes seins et tes photos de Jim Marshall. Pas plus qu'Hendrix, mais bon... Le mythe.
Petit matin blanc en Land Rover. C'était tellement beau que je n'y croyais plus, je me disais que c'était pas vrai. Alors, un jour, en passant, j'ai ressorti mes diapos, et je les ai regardées : ça avait existé, et ça existait encore. Incroyable. Tout : l'apprche, en dessus Moustiers, sur la voie romaine, la montée en lacets, le plateau façon Argentine en février, battu par les vents. La nuit dans la paille d'une cabane de bergers barbares. Le réchaud à essence et le whisky sec qui demandait rien personne. La neige, le lendemain, + le ciel bleu de folie. Tellement incroyable que quand je raconte ce qui s'est passé, on me croit pas. Mais je m'en fous, ça m'étonne pas. Ce qui est encore plus certain, c'est que des balades pareilles, c'est plus possible, fini. On se faisait ça entre hommes, pas chiants, mais sûr aussi qu'une petite accore nous aurait bien tenu chaud. Et que tu n'étais pas là, bien trop occupée à te trouver un mari qui jamais n'aurait voulu participer à nos raids de fous-furieux, éqipées de Land Rover, Jeep et autre Toyota land cruiser (mais la vieille, la vraie, celle qui était faite pour transporter des hommes, des vrais).
CONTINUONS EN MER, ou KEEP ON SAILING, ou le port de VIGO. Espagne, Galice, port franc créé par FRANCO. ...- FRANCO de PORT.
Nous y développâmes notre plus grosse usine, et la presse locale (qui n'est jamais commode) nous attribua vingt-cinq ans plus tard le titre de bienfaiteurs de la ville. La Galice est la patrie du Général Franco, il fit ce geste pour elle, elle ne mordit jamais la main de fer qui l'avait nourrie. Je m'étais réjoui de la mort du dictateur, en son temps. Je l'avais fêtée dans un préfa de la fac de Droit. C'était une erreur : nul ne peut faire le bilan d'une vie d'un autre impunément. L'Espagne que Franco avait reconquise sortait de mille ans de guerres. Le sud avait été plus longtemps musulman que catholique. Un certain manque d'intelligence, les guerres, la religion, la consanguinité et les répressions avaient fait rage. On considère maintenant que Franco a préparé ce pays à entrer en Europe. Et si ça a merdé un peu, c'est après lui.
Pour moi aussi, c'était génial : je me posai en milieu d'après midi sur une piste spectaculaire, je travaillais un coup jusqu'au soir, puis je me régalais de coquillages sans trop de goût chez une nommée Maria Alcocer, en regardant le soir tomber. Je prenais une ou deux photos. J'avais le temps : en vérité, il était bien trop tôt pour dîner, pour Maria, c'étaient des "horaires de Français", son restaurant était encore vide. Qu'importe : coquillages, comme en Bretagne. Je les aurais si volontiers partagés avec toi, Clara chérie, ma chiquilla ! Mon plumard aussi, qui était morne et solitaire comme celui d'un maigre moine : je ne dormais avec personne, et ce grand lit est toujours resté aussi vide que le restaurant de Maria.
Le lendemain, j'étais à l'usine dès l'aube. Je rentrais par l'avion de 15h00. Nous survolions toutes les Espagnes en somnolant.
EUT-IL AIMÉ L'AMÉRIQUE, SERGE ? Une Amérique où nous aurions roulé en décapotable, du côté de Los Angeles, avec une amie qui vous sert des boissons fraiches ?
Ça, c'est l'Amérique, tu vois, Max ? Celle dont on déparle, celle dont je rêve, celle qui n'existe plus, non plus. L'inverse de la France des chemins de fer, quoi...
GOODY GIRLS :
Finis, les monts de Vénus tant aimés des marins : Nom d'un mont, le Mont Aigoual.
Ultime goodie-girl. Par une belle après midi de je ne sais plus quand, du côté de Maisons-Lafitte, nous avons joué à Gustave Courbet.